Gaz effet de serre def et rôle dans le changement climatique : explications accessibles et données clés

Gaz effet de serre def et rôle dans le changement climatique : explications accessibles et données clés

Que sont exactement les gaz à effet de serre ?

On en parle partout, mais les gaz à effet de serre restent pour beaucoup une notion floue. Polluants ? Naturels ? Artificiels ? Un peu tout à la fois.

Un gaz à effet de serre (GES) est un gaz présent dans l’atmosphère qui absorbe et réémet une partie du rayonnement infrarouge émis par la Terre. Résultat : il retient la chaleur dans la basse atmosphère et participe au réchauffement du climat.

Sans ces gaz, la température moyenne à la surface du globe serait d’environ -18 °C. Grâce à eux, elle est d’environ +15 °C. Problème : les activités humaines en augmentent fortement la concentration, ce qui renforce l’effet de serre naturel et dérègle le climat.

Comme le résume un climatologue du GIEC que j’ai interrogé récemment : « Le système climatique n’a pas de bouton pause. Plus on injecte de gaz à effet de serre, plus la machine s’emballe. »

Les principaux gaz à effet de serre : qui fait quoi ?

Plusieurs gaz contribuent à l’effet de serre. Ils n’ont pas tous le même pouvoir réchauffant, ni la même durée de vie dans l’atmosphère. C’est ce qui rend le sujet plus complexe qu’un simple « CO₂ = mauvais ».

Les principaux GES sont :

  • Le dioxyde de carbone (CO₂) : le plus connu, car le plus émis par les activités humaines. Il provient surtout de la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz), de la déforestation et de certains procédés industriels (ciment, acier). Il reste très longtemps dans l’atmosphère : une partie significative de ce que nous émettons aujourd’hui sera encore là dans plusieurs siècles.
  • Le méthane (CH₄) : un gaz au pouvoir réchauffant bien plus élevé que le CO₂ à court terme. Il est émis par l’élevage (fermentation entérique des ruminants), les rizières, les fuites dans les infrastructures gazières, les décharges ou encore la fonte du permafrost. Sa durée de vie est plus courte (une dizaine d’années), mais son impact immédiat sur le climat est massif.
  • Le protoxyde d’azote (N₂O) : il vient surtout de l’agriculture (engrais azotés, élevage) et de certaines activités industrielles. Il est moins souvent cité que le CO₂ ou le CH₄, mais son pouvoir de réchauffement et sa durée de vie (plus de 100 ans) en font un acteur important.
  • Les gaz fluorés (HFC, PFC, SF₆, etc.) : produits uniquement par l’homme, utilisés dans la réfrigération, la climatisation, certains procédés industriels ou équipements électriques. Ils sont présents en plus faibles quantités mais certains ont un pouvoir de réchauffement des milliers de fois supérieur à celui du CO₂.

Selon le GIEC, les activités humaines ont provoqué une augmentation de la concentration de CO₂ dans l’atmosphère de plus de 50 % depuis l’ère préindustrielle (passage d’environ 280 à plus de 420 ppm en 2024). Pour le méthane, l’augmentation dépasse 150 %.

Comment fonctionne l’effet de serre ?

Pour comprendre le rôle des gaz à effet de serre dans le changement climatique, il faut revenir à un mécanisme simple de physique.

Le système fonctionne en trois étapes :

  • Le Soleil envoie un rayonnement principalement visible qui traverse largement l’atmosphère et réchauffe la surface de la Terre.
  • La Terre réémet une partie de cette énergie sous forme de rayonnement infrarouge (chaleur) vers l’espace.
  • Les gaz à effet de serre absorbent une partie de ce rayonnement infrarouge et le réémettent dans toutes les directions, y compris vers la surface. La chaleur est partiellement piégée.

C’est l’équilibre entre l’énergie entrante (du Soleil) et l’énergie sortante (vers l’espace) qui détermine la température moyenne du globe. En augmentant la concentration de GES, on modifie cet équilibre. L’atmosphère retient davantage de chaleur, et la température moyenne s’élève.

Ce n’est pas une hypothèse récente. L’effet de serre a été décrit dès le XIXe siècle par le physicien français Joseph Fourier, puis quantifié par le Suédois Svante Arrhenius à la fin des années 1890. Les modèles climatiques modernes ne font que confirmer la robustesse de ce mécanisme, avec des données de plus en plus précises.

CO₂, méthane, protoxyde d’azote : un impact très différent sur le climat

Pour comparer l’impact des différents gaz, les scientifiques utilisent une unité commune : l’équivalent CO₂ (ou CO₂e). On convertit ainsi la quantité de chaque gaz en fonction de son pouvoir de réchauffement global (PRG), c’est-à-dire sa capacité à piéger la chaleur par rapport au CO₂, sur une durée donnée (généralement 20 ou 100 ans).

Sur un horizon de 100 ans, les ordres de grandeur retenus par le GIEC sont :

  • CO₂ : PRG = 1 (gaz de référence).
  • Méthane (CH₄) : PRG ≈ 27–30. Autrement dit, 1 tonne de CH₄ réchauffe en moyenne autant que près de 30 tonnes de CO₂ sur 100 ans.
  • Protoxyde d’azote (N₂O) : PRG ≈ 270–280.
  • Certains gaz fluorés : PRG de plusieurs milliers à plus de 20 000 pour le SF₆, par exemple.

Mais ce n’est pas tout. Il faut aussi regarder la durée de vie dans l’atmosphère :

  • Le CO₂ n’a pas une durée de vie fixe, mais une partie reste présente pendant plusieurs siècles.
  • Le méthane est beaucoup plus éphémère (environ 10 à 15 ans) mais très intense à court terme.
  • Le N₂O dépasse souvent 100 ans.

Résultat : le CO₂ est le principal responsable du réchauffement à long terme, tandis que le méthane est un puissant levier pour ralentir le réchauffement à court terme. C’est la raison pour laquelle plusieurs rapports récents insistent sur la nécessité de s’attaquer simultanément aux deux.

Ce que disent les chiffres sur le rôle des GES dans le changement climatique

Les observations ne laissent guère de place au doute. Les émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine ont augmenté de manière quasi continue depuis les années 1950, avec une accélération marquée à partir de 1990.

Selon le GIEC (rapport AR6) :

  • Les activités humaines ont réchauffé la planète de environ 1,1 °C par rapport à la période 1850–1900.
  • Les gaz à effet de serre sont responsables de la quasi-totalité de ce réchauffement observé.
  • Le CO₂ représente la majeure partie du forçage radiatif (le « déséquilibre énergétique » imposé au système climatique), suivi par le méthane.

Températures moyennes, fonte des glaciers, recul de la banquise arctique, montée du niveau des mers, intensification de certains extrêmes météorologiques : ces indicateurs évoluent tous dans le sens attendu par la physique du climat lorsque l’on augmente la concentration de GES.

Les scénarios du GIEC montrent aussi que le lien entre émissions cumulées de CO₂ et réchauffement est à peu près linéaire. En clair : chaque tranche de 1 000 milliards de tonnes de CO₂ émises rapproche d’environ 0,45 °C de réchauffement supplémentaire. On parle ainsi de « budget carbone » restant pour rester sous 1,5 °C ou 2 °C.

Qui émet quoi ? Les grandes sources de gaz à effet de serre

Les gaz à effet de serre ne viennent pas de nulle part. Ils sont intimement liés à nos modèles de production et de consommation. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) et le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) dressent régulièrement un panorama de ces émissions par secteur.

Les grandes catégories de sources d’émissions de GES sont :

  • Production d’énergie et électricité : combustion de charbon, pétrole et gaz pour générer de l’électricité ou de la chaleur. C’est aujourd’hui la première source mondiale de CO₂.
  • Transports : voitures, poids lourds, aviation, transport maritime. Les carburants fossiles dominent encore largement ce secteur, même si l’électrification progresse.
  • Industrie : ciment, acier, chimie, raffinage. L’industrie contribue à la fois via la consommation d’énergie et via des procédés émetteurs (comme la décarbonatation du calcaire lors de la fabrication du ciment).
  • Agriculture et élevage : ici, le méthane et le N₂O sont en première ligne. Les ruminants, les rizières, la gestion des déjections animales et les engrais azotés sont des sources majeures.
  • Bâtiments : chauffage au gaz, au fioul, climatisation (qui mobilise parfois des gaz fluorés à fort PRG).
  • Déforestation et changement d’usage des terres : la destruction de forêts libère le carbone stocké dans la biomasse et réduit la capacité de la planète à absorber du CO₂.

Un point souvent sous-estimé : près de la moitié du CO₂ émis chaque année n’est pas immédiatement visible dans l’atmosphère. Il est temporairement absorbé par les océans et la biosphère terrestre (forêts, sols, végétation). Ces « puits de carbone » freinent le réchauffement… mais ils ne sont pas inépuisables, et certains sont déjà fragilisés par les changements climatiques eux-mêmes.

Des effets en chaîne : rétroactions et points de bascule

Augmenter la concentration de gaz à effet de serre ne signifie pas seulement « quelques degrés de plus ». Le système climatique réagit avec des rétroactions parfois très puissantes.

Parmi les mécanismes clés :

  • La vapeur d’eau : c’est en fait le premier gaz à effet de serre naturel. Un air plus chaud peut contenir plus de vapeur d’eau, ce qui renforce l’effet de serre. C’est une rétroaction positive : le CO₂ réchauffe, ce qui augmente la vapeur d’eau, qui réchauffe encore.
  • La glace et la neige : la glace réfléchit une bonne partie du rayonnement solaire. Lorsqu’elle fond, elle est remplacée par des surfaces plus sombres (océan, sols), qui absorbent davantage de chaleur. Là encore, rétroaction positive.
  • Le permafrost : ce sol gelé en permanence dans les hautes latitudes contient de grandes quantités de carbone. S’il dégèle, il peut relâcher du CO₂ et du méthane, renforçant le réchauffement.

Ces rétroactions expliquent pourquoi une augmentation apparemment « modeste » des gaz à effet de serre peut aboutir à des changements climatiques rapides à l’échelle géologique. Elles sont aussi à l’origine des inquiétudes autour de certains points de bascule, ces seuils au-delà desquels une partie du système climatique pourrait se transformer de manière difficilement réversible (effondrement de calottes glaciaires, mortalité massive de forêts, etc.).

Pourquoi se focaliser autant sur les gaz à effet de serre ?

Il existe d’autres formes de pollution atmosphérique : particules fines, dioxyde de soufre, oxydes d’azote, etc. Elles ont des effets majeurs sur la santé humaine, parfois sur certains écosystèmes, mais leur rôle dans le réchauffement global est plus complexe ou indirect.

Les gaz à effet de serre, eux, ont trois caractéristiques qui en font une priorité :

  • Ils agissent à l’échelle planétaire : leurs effets ne sont pas confinés à la région émettrice.
  • Ils ont un effet cumulatif : en particulier le CO₂. Chaque tonne ajoutée s’empile sur les précédentes.
  • Ils conditionnent de nombreux autres risques : vagues de chaleur, sécheresses, montée des eaux, pression sur la biodiversité, sécurité alimentaire, migrations, etc.

Autrement dit, s’attaquer aux gaz à effet de serre, ce n’est pas seulement « sauver les ours polaires » ; c’est tenter de stabiliser un système dont dépend l’ensemble de nos sociétés.

Peut-on vraiment agir sur les gaz à effet de serre ?

La question est légitime. Face à un problème global, invisible et aux dynamiques longues, l’action semble parfois dérisoire. Pourtant, les leviers sont connus et techniquement accessibles. La difficulté est surtout politique, économique et sociale.

Les grands axes de réduction des GES identifiés par le GIEC et l’AIE incluent :

  • Décarboner la production d’électricité : remplacement progressif du charbon, du pétrole et du gaz par des énergies bas carbone (renouvelables, nucléaire selon les contextes), amélioration de l’efficacité des réseaux.
  • Réduire la demande énergétique : rénovation thermique des bâtiments, amélioration de l’efficacité industrielle, sobriété dans certains usages.
  • Transformer les mobilités : véhicules plus sobres, électrification, transports collectifs, aménagement du territoire réduisant la dépendance à la voiture individuelle.
  • Agir sur l’agriculture et l’alimentation : réduction du gaspillage alimentaire, évolution des régimes alimentaires (moins de viande issue de ruminants), pratiques agricoles limitant les engrais azotés de synthèse et favorisant le stockage de carbone dans les sols.
  • Protéger et restaurer les puits de carbone naturels : forêts, zones humides, sols, mangroves.
  • Encadrer les gaz fluorés : réglementation stricte, alternatives moins réchauffantes, meilleure gestion en fin de vie des équipements.

Des technologies de capture et stockage du carbone (CSC) ou de « carbone négatif » (reforestation, bioénergie avec CSC, capture directe dans l’air) sont aussi débattues. Les experts rappellent cependant qu’elles ne peuvent pas remplacer une réduction rapide et massive des émissions à la source. Elles peuvent, au mieux, compléter l’effort.

Comprendre pour mieux décider

Les gaz à effet de serre ne sont plus un sujet réservé aux laboratoires de physique de l’atmosphère. Ils sont devenus un paramètre central de la géopolitique, de l’économie, de l’aménagement du territoire, de la santé publique.

Comprendre leur rôle dans le changement climatique, c’est :

  • mettre un peu d’ordre dans un débat saturé de chiffres et de slogans,
  • distinguer les ordres de grandeur (le CO₂ des gaz fluorés, le court terme du long terme),
  • identifier où se situent les marges de manœuvre réelles,
  • et, surtout, savoir à quoi servent – ou non – les politiques climatiques annoncées.

Une chose est sûre : chaque dixième de degré évité compte. Réduire les émissions de gaz à effet de serre ne reviendra pas à « remettre le climat comme avant », mais à limiter les dommages et à conserver des sociétés vivables dans de nombreuses régions du monde. La physique de l’atmosphère ne négocie pas, mais nos choix collectifs, eux, restent ouverts.