Les applications qui consomment le plus de 4g et leur impact environnemental

Les applications qui consomment le plus de 4g et leur impact environnemental

Quand les applis avalent nos données… et notre planète

Nous passons en moyenne plus de 4 heures par jour sur notre smartphone, dont une grande partie en ligne. Mais à chaque vidéo regardée, message envoyé ou story scrollée, c’est une quantité considérable de données qui transite via les antennes relais, les serveurs et les infrastructures numériques. Résultat : une consommation en énergie très loin d’être neutre. Et au cœur de cette frénésie de données, certaines applications se révèlent particulièrement voraces. TikTok, YouTube, Instagram, Netflix… Les suspects sont connus. Mais connaît-on réellement leur impact environnemental ?

À l’heure où la sobriété numérique devient un enjeu central de la transition écologique, il est temps de regarder notre écran autrement : combien consomment réellement nos applis favorites, et quelles en sont les répercussions concrètes sur notre empreinte carbone ?

Quel est le lien entre data et CO₂ ?

Avant d’identifier les applications les plus énergivores, il faut comprendre ce que représente exactement une donnée mobile (4G ou 5G) en termes d’impact écologique. Lorsqu’on regarde une vidéo en streaming, par exemple, les données transitent depuis un serveur (souvent situé à l’autre bout du monde) jusqu’à notre appareil. Cette transmission implique :

  • des data centers (centres de stockage) très gourmands en électricité,
  • des réseaux de télécommunication (antennes, câbles sous-marins) qui nécessitent infrastructure et énergie,
  • le traitement local par notre appareil, lui aussi alimenté en électricité.

En 2023, selon l’Ademe, 1 Go de données mobiles consommé équivaut à environ 18 g de CO₂ émis. Ce chiffre peut varier selon les pays et la technologie (3G, 4G, 5G), mais reste une bonne base de calcul. Or, certaines applications peuvent consommer plusieurs gigaoctets en une heure. Faites le calcul…

Les applications les plus gourmandes en data mobile

En analysant les usages moyens rapportés par des études comme celles du Digital Wellbeing Report (2023) ou de Statista, on identifie rapidement les champions de la data. Voici celles qui se distinguent par leur consommation très (voire trop) généreuse :

  • Netflix : Environ 1 Go par heure en qualité standard. Jusqu’à 3 Go par heure en HD. Sur mobile, cela peut grimper encore en cas d’affichage automatique de haute qualité.
  • TikTok : En moyenne 840 Mo par heure. Les vidéos en boucle, les stories en autoplay et l’algorithme très réactif en font un avaleur de data constant.
  • YouTube : De 500 Mo à 1,5 Go par heure selon la résolution, avec une écoute passive fréquente qui masque la consommation réelle.
  • Instagram : Environ 720 Mo par heure, surtout en scrollant des vidéos ou Reels. Chaque nouvelle story déclenche un téléchargement.
  • Facebook : Contrairement aux idées reçues, Facebook reste un gros consommateur, avec une moyenne de 640 Mo/heure, notamment à cause des vidéos autoplay.
  • Spotify (en streaming) : Jusqu’à 150 Mo par heure en haute qualité. S’il paraît modeste en comparaison, l’usage continu — plusieurs heures par jour — fait grimper l’empreinte.

Empreinte numérique : petits gestes, gros impact

Télécharger une vidéo YouTube plutôt que de la regarder plusieurs fois en streaming, désactiver la lecture automatique de stories, passer en mode éco sur Spotify… Des gestes anodins ? Pas tant que ça. Car si chacun d’entre nous optimisait son usage de la 4G, les économies en CO₂ seraient colossales à l’échelle mondiale.

Selon une étude de la Commission européenne (2021), le streaming vidéo représente environ 60 % du trafic mondial de données sur Internet. Et la moitié de cette consommation provient des smartphones. Conclusion : c’est dans notre poche que tout commence.

Des chiffres qui donnent à réfléchir

Pour mieux visualiser l’impact, prenons un utilisateur moyen de TikTok (près de 1h30 d’usage quotidien). Sur une semaine, cela revient à environ 9 Go de données, soit environ 162 g de CO₂. Sur un an ? Plus de 8,4 kg de CO₂. Pour une seule application.

À l’échelle d’un pays comme la France, avec environ 15 millions d’utilisateurs actifs de TikTok en 2023, cela représenterait plus de 126 000 tonnes de CO₂ par an. C’est l’équivalent des émissions annuelles de 15 000 voitures thermiques.

La 5G : solution ou aggravation ?

Avec la promesse d’une vitesse de connexion jusqu’à 10 fois supérieure à la 4G, la 5G fait fantasmer les industriels. Mais elle incite également à une surconsommation de données. Le visionnage de films en ultra HD, la réalité augmentée ou les jeux cloud deviendront la norme — au détriment de la sobriété énergétique.

Un rapport du Shift Project (2022) note que la 5G pourrait entraîner une augmentation de 30 % de la consommation énergétique du numérique si elle n’est pas accompagnée de mesures de régulation. Accélérateur technologique ou piège écologique ? La question reste ouverte.

Peut-on vraiment concilier numérique et climat ?

Le numérique, s’il est bien utilisé, peut être un allié dans la lutte climatiques : outils de sensibilisation, modélisation de phénomènes climatiques, optimisation énergétique, etc. Mais l’envers du décor mérite d’être regardé en face. Car derrière l’illusion d’un monde virtuel immatériel, les impacts sont bien réels : serveurs surchauffés, terminaux énergivores, explosion des objets connectés, etc.

Marie Doutreligne, ingénieure spécialisée en éco-conception numérique, confirme : «La première sobriété doit être logicielle. Les développeurs ont un rôle crucial à jouer pour concevoir des services moins gourmands. Mais les utilisateurs doivent aussi se responsabiliser. Actuellement, on privilégie la performance, pas la frugalité.»

Des leviers simples pour changer la donne

Adopter un usage numérique plus raisonné ne signifie pas revenir à l’âge de pierre. Il s’agit plutôt de se poser les bonnes questions : ai-je besoin de streamer cette vidéo maintenant, en HD, en 4G, sur mon téléphone ? Quelques bonnes pratiques peuvent réduire drastiquement notre impact :

  • Limiter le streaming en mobilité (privilégier le Wi-Fi, moins énergivore),
  • Télécharger ses contenus (podcasts, vidéos) à l’avance quand c’est possible,
  • Désactiver les vidéos automatiques dans les paramètres des applis,
  • Utiliser les versions « allégées » des applis quand elles existent (Facebook Lite, YouTube Go, etc.),
  • Mesurer sa consommation de data via les paramètres du téléphone pour mieux la contrôler,
  • Faire le ménage régulièrement dans ses applications inutilisées.

Vers une prise de conscience collective ?

Le sujet est désormais sur la table. Plusieurs institutions, dont l’ADEME et l’ARCEP en France, militent pour davantage de transparence sur la consommation des données mobiles. Des start-ups émergent avec des services « low data », et de grandes plateformes commencent timidement à intégrer des options d’économies d’énergie.

Certaines initiatives citoyennes, comme le collectif GreenIT.fr, plaident pour un code de bonne conduite du numérique, incluant aussi bien les développeurs que les utilisateurs finaux. Car c’est un fait : le numérique durable n’est pas une utopie, mais une nécessité à construire ensemble.

Alors la prochaine fois que vous lancerez une vidéo depuis le métro, posez-vous cette question : est-ce indispensable maintenant ? Faire scroller ses doigts, c’est facile, mais faire scroller le carbone, c’est aussi notre responsabilité.