Site icon Planet Mag

Secteur les plus polluants : industries en tête des émissions de CO2 dans le monde

Secteur les plus polluants : industries en tête des émissions de CO2 dans le monde

Secteur les plus polluants : industries en tête des émissions de CO2 dans le monde

Industrie et CO₂ : les faiseurs de fumée dominent toujours

Chauffage planétaire, feux de forêts, hausse du niveau des mers… Dans l’ombre de ces maux bien visibles se profile un monstre plus abstrait, mais redoutable : le dioxyde de carbone (CO₂). Et ses principaux émetteurs ? Les industries lourdes. Derrière les promesses vertes, une réalité chiffrée persiste : certaines activités industrielles continuent de peser lourdement sur notre atmosphère. Comprendre qui pollue, pourquoi et dans quelles proportions, c’est déjà un pas vers l’action.

Un trio de tête : énergie, bâtiment, et industrie lourde

Chaque année, près de 36,8 milliards de tonnes de CO₂ sont relâchées dans l’air (source : Global Carbon Atlas, 2023). Les secteurs les plus émetteurs restent inlassablement les mêmes :

Les transports arrivent juste derrière (≈16 %), mais contrairement à une idée reçue, leur empreinte carbone reste inférieure à celle des gigantesques complexes industriels — souvent invisibles aux yeux du grand public.

Sidérurgie : l’enfer du carbone

Faire de l’acier, c’est simple en apparence : on chauffe du minerai de fer avec du charbon coque dans un haut-fourneau. Mais ce processus, inchangé depuis le XIXe siècle, est un gouffre carbone. Pour chaque tonne d’acier produite, environ 1,8 tonne de CO₂ est émise. Or, en 2022, le monde a produit 1,9 milliard de tonnes d’acier (source : World Steel Association). Faites le calcul.

La Chine concentre à elle seule presque 54 % de cette production. Si elle multiplie les engagements climatiques, notamment à travers la technologie de réduction directe du fer (DRI), le charbon règne encore dans ses aciéries.

Ciment : solide, mais étouffant

Le ciment est partout : routes, immeubles, trottoirs. Moins médiatisé que l’automobile ou le plastique, il cumule pourtant des records peu reluisants. Sa fabrication génère près de 8 % des émissions mondiales de CO₂ (source : Chatham House, 2023). En cause ? La réaction chimique de décarbonatation du calcaire, qui libère naturellement du CO₂ — même sans apport énergétique.

Autre problème : la quasi-totalité du secteur utilise encore des combustibles fossiles pour chauffer les fours à plus de 1 400°C. Des acteurs comme Lafarge (Holcim) expérimentent bien des « ciments bas carbone », mais leur part reste marginale.

Chimie et plasturgie : entre innovations et contradictions

À première vue, l’industrie chimique est moins productrice de CO₂ que l’acier ou le ciment. Pourtant, sa complexité rend sa traçabilité plus floue. Elle fait appel à une multitude de procédés énergivores et dépend largement du gaz naturel — à la fois comme énergie et matière première.

La production d’ammoniac (engrais), par exemple, représente à elle seule 1,8 % des émissions mondiales. Et la fameuse plasturgie ? Son empreinte carbone sera multipliée par 3 d’ici 2050 selon le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), si aucune mesure structurante n’est prise.

Les champions de la pollution : focus sur quelques géants

Certains groupes industriels, malgré les efforts de communication verte, figurent toujours parmi les plus gros émetteurs. Le Carbon Majors Report (2023), établi par le CDP et l’Union of Concerned Scientists, révèle que 100 entreprises seulement sont responsables de 71 % des émissions industrielles de gaz à effet de serre depuis 1988.

Parmi les plus polluants, figurent :

Ces mastodontes bénéficient souvent de subventions étatiques et pèsent lourd dans leurs économies respectives. Résultat ? Les tentatives de régulation se heurtent à des intérêts politiques bien ancrés.

Des efforts… mais à double vitesse

Ces dernières années, plusieurs pays industrialisés ont lancé des programmes ambitieux pour « décarboner » leur industrie. Citons l’Union européenne et son Pacte vert, qui prévoit la neutralité carbone en 2050. Des technologies émergent :

Mais ces avancées, bien que notables, coûtent cher et avancent lentement. Parallèlement, la construction d’usines à charbon a repris en Chine et en Inde, tandis que les États-Unis et le Moyen-Orient investissent massivement dans la pétrochimie.

Et le paradoxe est là : l’innovation progresse à l’Ouest, mais la production industrielle et les émissions, elles, se déplacent vers l’Est.

Exportation des émissions : une hypocrisie globale ?

Un jean importé de Chine, un smartphone assemblé au Vietnam, une tablette conçue en Californie mais produite à Taïwan… Nos choix de consommation sont profondément liés aux émissions industrielles à l’étranger.

Selon une étude de Nature Climate Change (2022), environ 25 % des émissions mondiales sont liées aux biens consommés dans un autre pays que celui où ils sont produits. L’empreinte carbone d’un Européen, par exemple, est souvent sous-estimée si l’on ne compte que ce qui est émis localement.

Une question s’impose alors : comment responsabiliser les géants industriels si la demande vient de nous ?

Que faire face à ces industries T-Rex du carbone ?

Face à ces mastodontes, l’action semble parfois dérisoire. Pourtant, elle existe, à tous les niveaux :

Les transitions profondes demandent de la volonté, des réseaux d’acteurs et du temps. Mais elles sont déjà en marche dans certaines régions. Le défi n’est pas tant technique qu’économique et politique.

Vers une industrie compatible avec le vivant ?

La transition des industries lourdes ne pourra se faire sans une logique de coopération globale. L’Accord de Paris l’a compris. Mais aujourd’hui encore, les émissions continuent de croître dans de nombreuses zones industrielles stratégiques. La tentation du statu quo reste forte. Les entreprises préfèrent parfois acheter des crédits carbone que transformer leur modèle.

Mais des signaux faibles émergent : Danemark, Suède, Pays-Bas montrent qu’une industrie plus vertueuse est possible, au prix d’un investissement, d’un accompagnement et d’une pression sociétale forte.

S’il n’existe pas de baguette magique contre le CO₂, il y a encore moins de place pour l’inaction. Identifier les émissions à la source, c’est déjà faire tomber les masques. Car derrière chaque tonne de béton ou d’acier, un choix énergétique — et une responsabilité collective.

Quitter la version mobile