Exemples de greenwashing : reconnaître les fausses promesses écologiques des marques

Exemples de greenwashing : reconnaître les fausses promesses écologiques des marques

Le greenwashing : quand le marketing repeint l’écologie en vert

Apposer une étiquette « éco-responsable » ou « durable » sur un produit ne signifie pas que celui-ci l’est réellement. Depuis quelques années, nombreuses sont les marques à surfer sur la vague verte pour redorer leur image. Ce phénomène, appelé greenwashing (ou écoblanchiment), rend la frontière entre engagement réel et discours marketing de plus en plus floue.

Mais comment reconnaître ces fausses promesses écologiques ? Quels sont les signaux d’alarme à surveiller ? À travers des exemples concrets et des décryptages, voici une immersion dans les coulisses du greenwashing.

Une pratique ancienne devenue omniprésente

Le terme « greenwashing » est apparu dans les années 1980, mais son essor est lié à la prise de conscience environnementale des consommateurs dans les années 2000. À mesure que les enjeux climatiques s’imposaient dans le débat public, les marques ont intégré (ou feint d’intégrer) ces préoccupations dans leur communication. Résultat : des campagnes écolos… en apparence seulement.

Le problème n’est pas tant la volonté d’être plus durable – au contraire – que la manipulation de l’information. Le greenwashing consiste à faire croire à une démarche environnementale là où il n’y a qu’un vernis marketing. Le but ? Séduire des consommateurs de plus en plus exigeants.

Les signes qui doivent éveiller les soupçons

Identifier le greenwashing n’est pas toujours évident. Toutefois, certains indices permettent de s’en prémunir :

  • Un vocabulaire vague et non vérifiable : termes comme « naturel », « éco-friendly » ou « vert » sans aucune certification officielle.
  • Un produit mis en avant comme « durable » alors que l’ensemble de l’entreprise est polluante : une bouteille d’eau en plastique recyclé par une marque qui multiplie les emballages jetables.
  • Des visuels trompeurs : feuilles vertes, animaux sauvages ou paysages vierges utilisés en fond publicitaire sans lien avec le produit.
  • Une absence de transparence : la marque parle d’objectif « zéro carbone » mais ne détaille aucun plan concret pour y parvenir.

Une analyse récente du Conseil national de la consommation a révélé que près de 40 % des allégations environnementales utilisées dans les publicités étaient jugées ambiguës ou trompeuses par les experts. Le phénomène est donc loin d’être marginal.

Cas concrets : les marques prises la main dans le pot de peinture verte

Illustrons avec quelques exemples significatifs de campagnes remis en cause pour leur manque de sincérité environnementale.

H&M et sa collection « Conscious »

La marque de prêt-à-porter suédoise a lancé sa gamme « Conscious » pour promouvoir une mode plus responsable. Or, une enquête menée par l’organisation Changing Markets Foundation en 2021 a révélé que 60 % des produits « durables » d’H&M comportaient des affirmations trompeuses, notamment sur les matériaux utilisés ou les économies d’eau générées.

Plus grave encore, le modèle économique d’H&M reste basé sur la fast fashion, une industrie profondément polluante et consommatrice de ressources. Un simple label « Conscious » ne suffit donc pas à compenser des pratiques structurellement insoutenables.

Air France et sa « contribution volontaire carbone »

Dans sa communication, Air France propose aux passagers de compenser les émissions de leur vol en finançant des projets environnementaux, comme le reboisement ou l’agriculture durable. L’idée paraît vertueuse. En réalité, les crédits carbone achetés sont souvent peu contrôlés, et leur efficacité réelle est sujette à débat.

La justice française a d’ailleurs ouvert en 2023 une enquête préliminaire contre la compagnie pour « pratiques commerciales trompeuses à caractère écologique ». Un rappel que brandir un slogan vert ne suffit pas à faire oublier l’empreinte carbone massive du secteur aérien.

PepsiCo et sa « bouteille 100 % recyclable »

En 2022, PepsiCo a fièrement annoncé que ses bouteilles plastique étaient désormais « recyclables à 100 % ». Pourtant, ce message détourne l’attention du véritable problème : le recyclage n’est pas systématique et très peu de plastique recyclé est réutilisé. En France, à peine 30 % des plastiques sont recyclés, selon l’ADEME.

En promouvant la recyclabilité comme une solution miracle, PepsiCo entretient l’illusion que consommer des boissons en plastique jetable reste une option acceptable pour la planète.

Un cadre juridique encore imparfait

Face à l’essor du greenwashing, les régulateurs s’activent. La loi française dispose depuis 2021 d’un encadrement renforcé des allégations environnementales dans la publicité. En particulier, sont interdites :

  • Les mentions « neutre en carbone » sans justification scientifique rigoureuse
  • Les visuels ou slogans suggérant à tort une démarche écologique globale
  • L’usage de labels trompeurs non reconnus officiellement

Malgré tout, le greenwashing continue de prospérer, en grande partie parce que le contrôle reste complexe. Selon Morgane Legrillet, juriste spécialisée en droit de la consommation : « L’arsenal juridique existe, mais il est encore peu utilisé car les campagnes incriminées s’arrêtent souvent avant intervention des autorités. »

Vers une consommation plus éclairée : que peut faire le consommateur ?

Si certains acteurs institutionnels commencent à sévir, la vigilance des consommateurs reste essentielle. Voici quelques gestes simples pour se prémunir des faux discours écologiques :

  • Lire les étiquettes en détail : la composition, la présence de labels reconnus (Ecocert, Ecolabel, FSC, etc.), ou les mentions chiffrées sont de bons indicateurs.
  • Évaluer la cohérence globale d’une marque : un produit bio proposé par une entreprise pétrolière ? Méfiance.
  • S’informer via des sources indépendantes : ONG, comparateurs responsables, médias spécialisés (comme Planet Mag !).
  • Privilégier la sobriété : la meilleure démarche reste encore de consommer moins, mieux, et de privilégier la durabilité sur la nouveauté.

Un bon réflexe : poser des questions. Quelles sont les preuves ? Cette affirmation est-elle vérifiable ? Le produit ou la marque sont-elles certifiées par des organismes indépendants ? L’esprit critique est la meilleure arme contre la manipulation verte.

Quand des marques montrent l’exemple

Heureusement, certaines entreprises s’engagent réellement dans une transition écologique complète et transparente. Des marques comme Veja dans la mode, Lamazuna dans les cosmétiques solides ou encore Interface dans le secteur du mobilier de bureau adoptent des démarches sourcées, cohérentes et vérifiables.

Ces entreprises prennent en compte l’impact environnemental tout au long du cycle de vie du produit – de sa conception à sa fin de vie. Elles communiquent avec sobriété, publient leurs rapports RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) et acceptent d’être évaluées par des tiers.

Leur succès croissant montre que la sincérité n’est pas incompatible avec la compétitivité. Mieux : elle peut devenir un véritable levier de fidélisation pour une clientèle de plus en plus attentive.

L’enjeu : ne pas banaliser la manipulation verte

Le greenwashing n’est pas qu’un détail marketing : c’est un frein concret à la transition écologique. En entretenant le flou, il dilue les vrais engagements et sape la confiance du public. À force, il risque d’alimenter le cynisme plutôt que l’élan collectif dont nous avons besoin face à l’urgence environnementale.

Sortir de cette impasse passe par une alliance renforcée entre régulateurs, journalistes, consommateurs et chercheurs. Plus la lumière est faite sur les pratiques trompeuses, plus les marques devront rendre des comptes. Et plus la transparence deviendra un standard… plutôt qu’un argument publicitaire de plus.

À nous, lecteurs avertis, de repérer les impostures vertes, de soutenir les évolutions sincères, et de toujours nous poser cette question simple : ce geste est-il vraiment au service de la planète, ou juste d’un profit repeint en vert ?